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L’Ostara Ténébreux

“Obscurité, tu seras dorénavant pour moi la lumière. ” André Gide.

Cette réflexion n’aura pas pour but de vous parler de la façon communément admise de fêter Ostara, ni des énergies lumineuses qui lui sont généralement attribuées. 
Aujourd’hui j’espère vous faire voyager au sein de mes ressentis les plus personnels, les plus vibrants.
J’aimerais vous parler d’un Ostara plus sombre, plus gris, plus fort, plus ténébreux.
D’un doux rayon de soleil et de fleurs colorés; à un ciel orageux sur des terres désolées, traversez le miroir à mes côtés pour découvrir l’Ostara ténébreux.

Ma mère (que je salue ici) dans sa grande sagesse m’a toujours appris que l’équinoxe de printemps était le point de départ de la saison claire.
Je sais que dans beaucoup de cultures, ceci se fait un peu plus tôt, au sabbat d’Imbolc. Mais cela a toujours fait beaucoup plus de sens pour moi de voir le premier jour de la saison claire au lendemain de l’équinoxe.
Du latin aequus (égal) et nox (nuit). Je me suis toujours représentée l’équinoxe comme une balance, l’équilibre que je cherche tant. Cette balance se déséquilibre à mon sens lorsque le jour prend officiellement le pas sur la nuit, à Ostara donc, ou lorsque la nuit prend le pas sur le jour à Mabon.

Un amour pour l’automne

J’ai toujours été une femme de la saison sombre. Le sombre et l’obscur n’étant de mauvaises choses, mais je suis consciente que ma prêtrise avec Nyx a grandement facilité cette idée là, moins manichéenne. Je suis une amoureuse de l’automne. Je m’y sens chez moi. Les couleurs chatoyantes des feuilles mortes qui craquent sous nos pieds, la brume et le brouillard qui rampent sur la terre humide et donnent une ambiance mystique à ce tableau déjà merveilleux, et que dire de l’odeur ? Ce bois brûlé, ce feu silencieux qui invite au repli dans le doux foyer. J’ai toujours été une femme de la saison sombre, une femme de l’automne.


Je me souviens encore du jour où j’ai décrété “pour la vie” que l’automne serait ma saison préférée . J’étais en primaire, en CE1 pour être plus précise. La maîtresse faisait chaque lundi le tour des tables avec des questions pour que nous apprenions à débattre et parler de nos goûts personnels, et ce jour là, la fatidique question était : “Dites moi, quelle est votre saison préférée, et pourquoi ?”

Sa voix résonne encore dans mon esprit, les mains levées et les brouhaha de mes camarades aussi. Exceptionnellement, elle avait choisi de donner la parole aux élèves en partant de la fin de l’alphabet pour les noms de famille. Avec mon nom commençant par un B, autant vous dire que je suis passée dans les dernières, j’ai alors eu le loisir d’entendre parler chacun de mes camarades avant moi.
En bonne vierge, je me repassais toujours plusieurs fois en tête ce que je comptais dire à voix haute, et j’étais persuadée de dire quelque chose du genre “J’aime toute les saisons, je ne pourrais pas choisir de saison préférés, mais je sais que l’hiver est celle que j’aime le moins.”
Mais plus les enfants parlaient, plus nous entendions les mêmes réponses, les mêmes arguments.
-“L’été ! C’est les vacances et on va à la plage !”
-“L’hiver, on peut faire des bonhommes de neige, et des fois on n’a pas école !”
-“Le printemps, les fleurs sentent super bon”

Mais personne, pas un seul élève n’avait daigné parler de l’automne.
À cet âge sans doute, l’automne est associé à la rentrée, quelle saison ingrate pour des enfants de cet âge.

Loin de moi l’idée de vouloir me démarquer à cette époque, mais une fois que ce fut mon tour, je ne pus m’empêcher de changer d’avis.
L’automne, cette saison si détestée devait être si triste que personne ne l’apprécie…

Je me sentais très seule plus jeune, toujours mise à l’écart, je l’ai peut être prise en pitié ?
C’est alors que j’ai décidé de lui donner tout mon amour.
J’ai appris à l’aimer, et j’ai découvert depuis la plus belle des saisons.
Mais pourquoi parler d’automne et de saison sombre pour un article sur Ostara et l’équinoxe de printemps ?
J’y viens !

Un printemps trop lumineux

En grandissant, et surtout depuis les quelques dernières années, je ne pouvais m’empêcher de très mal vivre ce sabbat.
Comment pourrais-je être heureuse en sentant ma saison si loin ? Opposée sur la roue de l’année, l’équinoxe de printemps est aussi et surtout la célébration la plus lointaine de Mabon.
J’ai beaucoup médité à ce sujet, en m’efforçant de bien le vivre, car chaque fête a quelque chose à apporter, mais j’ai longtemps senti que je nageais à contre-courant, et un terrible constat m’est venu naturellement : Je n’aime pas cette célébration.
Elle est trop lumineuse, trop douce.

Dans mon insatiable quête de déconstruction, j’ai pris le temps au côté de la meilleure des conseillères, la nuit, de comprendre ce qui me déplaisait et de creuser un peu tout ça. Et s’ il existait une autre façon de célébrer l’équinoxe ? Et si cette image lumineuse n’étaient pas l’entière vérité ?
Je ressens effectivement ces énergies de croissance, ce soleil, cette chaleur. Mais je ressentais aussi beaucoup plus que ça. Mon envie d’approfondir les énergies de l’équinoxe et d’établir concrètement la façon dont elles vibraient en moi se faisait plus forte. Il est vain d’aller à contre-courant. J’ai donc pris une grande inspiration, me suis laissée emporter par les vagues et ai découvert l’équinoxe sombre.
Comme deux facettes d’une même pièce, l’équinoxe de printemps n’est pas que lumière et douce brise.

Il est aussi ciel gris et vent violent.
Tempête.
Pluie.
Orage.

Une alternative vibrante

Désormais je le vois différemment, le célèbre différemment.
S’il est souvent associé à la création, alors pourquoi ne pas détruire ? Détruire pour purifier, laisser les choses mortes derrière soi.
Je prends maintenant plaisir à casser, hurler, et tout ce qui a besoin de s’exprimer après les longues introspections de la saison sombre sort enfin.
En chantant, ma voix tremble, alors je chante plus fort ! Je monte le son.
Je prends de l’espace, l’espace dont j’ai besoin pour continuer d’évoluer.
Je déchire, je brûle toutes ces angoisses lumineuses qui reviennent chaque année, et je me rassure de voir que tous les jours, je me rapproche un peu plus de la saison sombre.

Comme pour Samhain, je sens que Ostara et Mabon, ou l’équinoxe de printemps et l’équinoxe d’automne, sont des moments hors du temps. Ils n’appartiennent pas vraiment au calendrier, à la roue. 

Ils sont là, sans l’être.

Le temps s’arrête dans sa course effrénée et nous laisse quelques secondes pour respirer avant de changer le sens de la balance.

Printemps comme automne, la brume se tapit dans les plaines ; dehors, il fait encore frais.
Aujourd’hui, après de longues réflexions, je vis un peu mieux le printemps.
J’apprends encore et toujours à approfondir ses énergies, à ressentir la violence de ses bourrasques, la pluie glaciale apportée par les derniers vents d’hiver, cette “autre” facette de l’équinoxe, cette autre facette qui apporte l’équilibre qui vibre tant en moi.

Je sais que parmi vous, beaucoup s’identifient à cette saison sombre qui me fascine? Ce que j’appelle désormais le sombre printemps, ou l’Ostara ténébreux me convient beaucoup mieux, d’où l’importance de prendre le temps de la réflexion. Chaque façon de célébrer est personnelle.

À travers cet article, j’espère vous avoir donné quelques pistes de réflexion pour espérer, pourquoi pas, mieux vivre son opposé… de l’autre côté du miroir.

Joyeuse séparation, soyez bénis.

 

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